Edito : L’amer revers de la médaille
– Tu travailles sur quoi en ce moment ?
– Je suis sur l’histoire de la commission d’enquête parlementaire sur les dérives dans le sport. C’est énorme ce qu’il se passe ! C’est le grand déballage. Les témoignages sont hallucinants : des violences sexuelles, de la pédocriminalité, le tout protégé par des institutions. Alors forcément, cette commission dérange. J’ai tout si tu veux!
– Eh ben si tu as ce qu’il faut, on va mettre ça en Une dans les kiosques.
Romain Molina avait ce qu’il fallait (voir le journal en kiosques) et voici l’histoire – fortement résumée – de cette une. Son enquête met en avant le scandale de la pédocriminalité dans le sport, couverte par le silence complice des institutions, dans un schéma similaire à celui de l’Église. Une commission d’enquête parlementaire tente de faire la lumière sur ces dérives. Malgré tous ces éléments tangibles, le traitement médiatique reste bien maigre depuis quelques mois. C’est donc ce dossier extrêmement sensible que nous avons souhaité mettre en une. Ce n’est pas une thématique de prédilection pour La Brèche – pour qui cela le serait en même temps ? – mais mettre en avant des sujets qui dérangent est notre raison d’exister. Des violences sexuelles couvertes, avec comme seule excuse « cette personne nous fait gagner des titres », est juste insupportable. Vouloir mettre le voile sur ces questions sous prétexte que les JO débarquent à Paris dans quelques mois l’est tout autant… Le revers de la médaille est un peu trop amer.
Ce sujet se trouve en huitième et dernière page. Oui, cela fait quatre pages de moins. Notre idée n’est pas de faire de la shrinkflation – ou réduflation en presque bon français – mais seulement de retomber sur nos pattes. Nos raisons sont économiques mais aussi humaines. Le noyau dur est bénévole et il est parfois difficile de tout mener de front. Il faut garder des forces pour avancer dans la durée. Mais on ne lâche pas ! Au contraire, nous sommes sur la bonne voie et nous espérons bien revenir sur un format de 12 pages, dès le prochain numéro.
Les ventes en kiosques progressent, sont encourageantes, mais pas encore suffisantes pour pérenniser le journal. Les plus de 1 000 abonnés, non plus. On se développe mais nous vivons uniquement grâce à nos lecteurs. Les clampins que nous sommes n’ont pas réussi à obtenir 1 euro d’aide pour l’instant. On aimerait vous dire que c’est un choix, qu’on a trop la classe et tout… Mais il nous manque environ 10 000 euros pour boucler sereinement l’année.
Alors c’est surtout frustrant de voir le groupe Les Échos – Le Parisien (LVMH) obtenir 14,16 millions d’euros d’aides, Le Monde 8,7 M€, l’Humanité 3,8 M€… et des indépendants comme Blast (0,8 M€), Charlie Hebdo (0,37 M€) mais aussi Le 1 (0,3 M€). Face à de tels montants, la question de la légitimité de ces aides se pose. Alors, jaloux ? Évidemment, mais nous ne pouvons nous en prendre qu’à nous-mêmes. Nous n’avons pas rempli toutes les cases avant de nous lancer. C’est le revers de la médaille de notre fougue. Mais sans cette dernière nous n’existerions pas, alors, on assume !