Après le “Green washing”, le “Green mining”
« Ce projet, exemplaire sur le plan environnemental et climatique, réduira drastiquement nos besoins d’importation de lithium et permettra de produire près de 700 000 batteries de véhicules électriques par an », a prédit Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie, à l’annonce de l’ouverture de la mine de Beauvoir, dans l’Allier. L’enthousiasme a été beaucoup moins marqué du côté d’Antoine Gatet, vice-président de France Nature Environnement, qui a réagi auprès de l’AFP : « Il faut arrêter avec le mythe de la mine propre ! Tout ça c’est de la communication et du flan. On ne sait pas extraire de la matière du sous-sol de façon propre, car une mine ça implique toujours à côté une grosse usine chimique de transformation, ce qui entraîne une exploitation, et à terme une pollution de l’eau et des quantités importantes de déchets qu’on ne sait pas gérer. »
Dans un rapport des Amis de la Terre intitulé Green mining is a myth, les auteurs notent que la transition énergétique a été une divine surprise pour l’industrie minière. Alors que le secteur est responsable de 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, et que les domaines consommateurs de métaux peuvent avoir une utilité sociale limitée (la spéculation et la joaillerie pour l’or, l’armée ou la quincaillerie numérique pour le reste), la transition énergétique a permis au secteur minier de verdir son image sans efforts, grâce à ses débouchés. En clair, le secteur minier peut rester polluant car il serait un mal nécessaire à la transition : c’est le Green mining.
« La crise de la Covid a montré qu’on avait besoin de récupérer notre souveraineté sur un certain nombre de matériaux très importants […] et donc je crois qu’il ne faut rien s’interdire […]. Il faut regarder ce qu’il y a chez nous et qu’on pourrait peut-être éviter d’importer de pays où justement ça va être prélevé de manière peu intéressante pour l’environnement […]. Il faut que nous regardions si ça vaut la peine d’en prélever en France. Et dans ces cas-là, […] nous avons besoin d’autorisations environnementales pour pouvoir lancer de nouvelles mines […]. Cela veut dire que nous pouvons avoir éventuellement des mines, mais qui seront beaucoup plus respectueuses de l’environnement que ce qui se passe ailleurs dans le monde […]. Se dire, c’est pas grave, on laisse polluer ailleurs en fermant les yeux […] non, ça ne va pas. Moi, je préfère qu’on fasse les choses chez nous, et qu’on les fasse bien », a expliqué Barbara Pompili (Télérama, 3/12/21).
Le gouvernement souhaite en effet la mise en place d’un label certifié « mine responsable ». Une idée déjà lancée en 2015 par le ministre de l’Économie, Emmanuel Macron, autour de l’idée de « mine durable ». Comme le note Reporterre, déjà à l’époque « plusieurs associations et ONG (SystExt, France Nature Environnement (FNE), etc.) avaient finalement claqué la porte, critiquant un projet bien trop vague, non contraignant et des garanties environnementales et sociales très insuffisantes »1.
Antoine Costa et Clément Goutelle
1 « Le label “mine responsable” ? De la science-fiction pour des géologues », Reporterre, 14/01/22