Un an après les Jeux olympiques, le citoyen paie la note

Derrière les promesses sur « l’héritage » et les retombées des Jeux olympiques, la réalité est bien différente : les dépenses publiques ont été doublées, les fédérations sportives françaises affichent de lourds déficits et certaines structures rénovées pour les JO sont déjà presque inopérantes.

Avec l’aide de plusieurs cabinets de relations publiques (Betc, Fullsix, Havas), les slogans positifs sur l’impact des JO ont été répétés en boucle. Entre « les Jeux paient les Jeux » et les sourires béats des Estanguet, Riner ou Parker sur cette « parenthèse enchantée », le citoyen a eu droit à un véritable bourrage de crâne. Problème, un an après « ces moments magiques », la Cour des comptes a publié une note d’étape révélant que les dépenses publiques avoisinaient près de 6 milliards d’euros1, soit le double du montant annoncé et présenté dans le projet de loi de finances 2025.

Comme à leur habitude, les organisateurs des JO ont crié au complot. « Un chiffre disproportionné par rapport à la réalité », s’est emporté le directeur Fabrice Lacroix, qui estime la note finale « autour de deux milliards d’euros ». Un chiffre évidemment fallacieux; la sécurité à elle seule a coûté environ 1,4 milliard et la note d’étape ne prenait même pas (encore) en compte les coûts liés aux opérations ayant visé à rendre la Seine baignable…

Rapports d’inspection cachés, plainte pour abus de confiance

Bénéficiant de généreuses subventions étatiques pour préparer les JO, les différentes fédérations sportives françaises affichaient pourtant des résultats économiques inquiétants avant la compétition. Sans surprise, elles sont donc tombées dans un gouffre financier avec la baisse substantielle des subventions après les Jeux. L’athlétisme, par exemple, affiche un déficit de 3,6 millions d’euros et a porté plainte contre X pour abus de confiance tandis que la lutte, déjà lourdement endettée et placée en plan de sauvegarde depuis 2018, n’arrive toujours pas à rembourser la majorité de ses créances malgré les millions d’argent public accordés par le ministère avant les JO (2,5 millions en 2024 !).

D’autres fédérations en proie à des soucis de comptabilité, notamment l’escrime, ont fait l’objet d’une mission de l’IGESR (Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche), dont les conclusions n’ont jamais été divulguées par le ministère des sports. Un manque de transparence assez criant puisque l’ancien président de la fédération d’escrime (FFE), Bruno Gares (qui fut conseiller de l’ex-ministre des sports et ancienne escrimeuse Laura Flessel), est accusé d’avoir notamment utilisé la carte de crédit de la FFE pour ses besoins personnels, comme la réparation du véhicule de sa femme2.

Amélie Oudéa-Castera, la reine du sport français

Visé par une enquête pour détournement de fonds, Gares se disait victime du service comptabilité de la fédération. « Ils m’ont pris pour un crétin car j’étais pour eux un paysan d’Aveyronnais », s’est-il justifié à Centre Presse Aveyron (29 janvier 2024). Une nouvelle théorie du complot rappelant les positions prises par Amélie Oudéa-Castera, la première défenseure des fédérations sportives et de l’héritage olympique quand bien même certaines structures, dont le Centre national du tir sportif à Châteauroux, ont (déjà) besoin d’être rafistolées.

Qu’importe, l’ancienne ministre des sports avait pu compter sur le soutien d’une cinquantaine de hauts dirigeants sportifs lorsque celle-ci était dans la tourmente au sein du ministère de l’Éducation nationale. Un appui qui se vérifia avec son plébiscite auprès du CNOSF, le Comité national olympique sportif français, dont elle a obtenu la présidence sans opposant au mois de juin, avec le salaire mensuel qu’elle avait demandé (9 000 euros) pour ce poste traditionnellement bénévole3. Pas une surprise puisque La Brèche avait révélé dès l’an dernier les tractations pour permettre à AOC de rester au sommet du sport français.

Et si certains en coulisses s’offusquent des possibles conflits d’intérêts, il n’en est rien : le véritable « héritage positif » des JO concerne avant tout ses dirigeants qui se recyclent de commissions en différentes organisations.

Romain Molina

Illustration : Thiriet

Paru dans La Brèche n° 13 (septembre-novembre 2025)

  1. « Les dépenses publiques liées aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024 : premier recensement », rapport de la Cour des comptes, 23 juin 2025 ↩︎
  2. « Malversations financières et enquête de l’IGESR, la Fédération d’escrime et son ex-président Bruno Gares en pleine crise », 20 minutes, 28 janvier 2024 ↩︎
  3. « Amélie Oudéa-Castéra réclame 9 000 euros par mois pour prendre la tête du Comité national olympique… une fonction traditionnellement bénévole », L’Humanité, 18 juin 2025 ↩︎