OpenAI toujours vainqueur sur le ring des présidentielles américaines
Peter Thiel soutient que « la technologie est une extraordinaire alternative à la politique, notre tâche est de trouver une voie pour y échapper »1. Une façon d’échapper à la politique est de la mettre à son service. Les quatre fondateurs d’OpenAI comptent parmi les entrepreneurs les plus influents de la vie politique américaine. Les présidentielles américaines ont ressemblé à un conflit entre Thiel et Musk côté « Républicains », Hoffman et Altman côté « Démocrates », pour que la victoire revienne en dernier recours aux entrepreneurs de la tech.
Thiel et Musk, ces « Républicains »
Le mentor Peter Thiel n’a jamais bougé sa ligne. Il animait déjà pendant ses études à Stanford une revue conservatrice pour dénoncer le multiculturalisme, la discrimination positive, et les « formes contre-nature de relations sexuelles » – lui-même étant immigré allemand et homosexuel. Thiel est chrétien évangélique, connu depuis 2008 comme un soutien financier des candidats républicains Ron de Santis, John McCain et Donald Trump. Pour résumer, Thiel porte le projet libertarien d’abolition des aides sociales et des réglementations dans la recherche techno-scientifique, mais soutient le mariage pour tous et les aides médicales à la procréation.
Elon Musk est lui aussi un chrétien nataliste (il a douze enfants), mais il fut longtemps aux côtés des « Démocrates ». Proche d’Obama, il vote encore Biden en 2020. Mais l’année suivante, patatras! Alors que le patron de Tesla interdit toute présence syndicale dans ses entreprises, Biden aime saluer l’engagement syndical de ses parents et se rend sur les piquets de grève de l’Union Automobile Workers.
Ce mauvais présage se confirme en 2021, quand le Président oublie ostensiblement de saluer Tesla parmi les industriels de l’automobile électrique. Le divorce est définitif. Musk, qui rachète Twitter et licencie 80 % du personnel, rétablit le compte de Donald Trump et d’autres influenceurs d’extrême droite. Ensemble, ils détruiront le wokisme, le communisme, et purgeront « l’État profond » de toute présence démocrate.
Altman et Hoffman, mécènes « Démocrates »
« La Tech doit être une force politique », déclare Altman en 2017 à son retour de Paris2. Le boss d’OpenAI vient de rencontrer Emmanuel Macron, « à la demande du candidat »3, pour lui présenter son idée sur le revenu universel : avec l’IA, « nous aurons une richesse illimitée et un nombre considérable de suppressions d’emplois, donc le revenu de base est tout à fait logique»4. Altman s’engage en 2020 auprès d’Hillary Clinton avant de financer la campagne de Joe Biden, à hauteur de 250 000 dollars, puis de soutenir Kamala Harris dernièrement. Elle est « beaucoup plus probusiness que Trump »5, résume le quatrième fondateur d’OpenAI Reid Hoffman, donateur de 7 millions de dollars, avec l’espoir qu’elle relâche la pression fiscale et les règles anti-trusts que Biden exerce à l’encontre de la Silicon Valley.
Et ça marche ! Quand Biden s’allie aux syndicats, Harris place sa candidature sous le signe d’une « économie d’opportunités ». Quand le Président souhaite réguler les applications nucléaires, biotechnologiques et chimiques de l’IA, sa vice-présidente vide son décret de toute mesure contraignante. Kamala Harris est définitivement l’alliée de la tech. Elle doit beaucoup à Laurene Jobs, veuve de Steve Jobs et femme la plus riche de la Silicon Valley, sa complice et bailleuse de fonds depuis plus de vingt ans. C’est elle qui a manœuvré auprès des donateurs influents pour écarter la candidature Biden, qu’elle jugeait « anti-tech ». Dès le retrait du président sortant, Jobs alignait encore plusieurs millions de dollars pour la candidature de son amie.
Trump a gagné mais dans tous les cas, l’équation présidentielle était limpide : peu importe le vainqueur, les intérêts des entrepreneurs de l’IA et de la Silicon Valley sont bien gardés.